Un
des phénomènes sociaux que l’on observe au Québec depuis quelques années est la
diminution de notre sens civique dans les lieux publics; le manque flagrant de
courtoisie, de politesse, d’affabilité et d’amabilité est de plus en plus fréquent.
Plusieurs
allèguent que l’éducation donnée maintenant aux enfants et aux adolescents
valorise moins l’importance de la politesse et de l’égard envers les personnes
qui nous entourent dans nos activités de tous les jours qu’il y a quelques
années. Je suis de cet avis, mais cela n’explique pas pourquoi de plus en plus
d’adultes considèrent peu cet aspect de notre vie collective. Par exemple, on
voit régulièrement des adultes de tous âges et de toutes classes sociales garer
leur véhicule en travers d’un passage à piétons ou devant l’entrée principale
d’un commerce achalandé, des fumeurs jeter leur mégot de cigarette au sol et
même certaines personnes cracher en pleine rue. Il n’est pas rare non plus de
voir quelqu’un tenter de dépasser d’autres citoyens dans une file d’attente ou
parler à haute voix à son cellulaire dans une salle bondée.
Le
chacun-pour-soi dans les lieux publics semble de plus en plus une façon d’agir
normale, une règle sociale acceptée. Je pense que les moyens de communication
rapides actuels et l’utilisation des médias sociaux qui nous accaparent de plus
en plus dans notre quotidien ainsi que la recherche à tout prix de la
performance sont certainement en cause. Aussi, tenir la porte à une personne
que l’on ne connaît pas, ou simplement saluer un passant ou une autre personne
à un arrêt d’autobus sont souvent perçus comme des gestes incongrus, voire
inquiétants.
Recherche d’isolement
On
échange de multiples messages courts avec des personnes loin de nous en
oubliant celles qui nous entourent dans notre environnement immédiat. Certains
marchent en regardant leur téléphone intelligent, comme si celui-ci pouvait
leur dicter leurs pas, et s’empêchent presque de voir les arbres, les fleurs et
d’entendre les oiseaux sur leur passage, ou, encore pire, les voitures et les
vélos qui s’approchent d’eux au prochain carrefour. Dans ce contexte, il n’est
pas surprenant qu’on ignore une personne dans la rue qui veut obtenir une
information ou qu’on ne cède pas le passage ou son siège dans un autobus à une
personne âgée ou ayant un handicap physique. On cherche donc l’isolement dans
la foule et, ce faisant, on se prive d’une communication simple qui rendrait
notre quotidien plus humain, plus fluide et plus confortable.
Je
ne pense pas que ces outils de communication attractifs et performants soient
les seuls en cause. Pensons aux comportements de plusieurs automobilistes
durant les périodes de circulation dense, où le chacun-pour-soi et la
performance supplantent souvent la courtoisie et le respect des autres,
occasionnant de la frustration et bien sûr du stress. Il y a enfin ceux et
celles qui se comportent à l’aéroport, dans les salles d’attente, à la
pharmacie et même au travail comme s’ils étaient dans leur jardin, dans leur
salon ou à la plage. Bien que cet aspect soit très important à mes yeux, je
crois aussi qu’un minimum d’éthique s’applique également à la tenue
vestimentaire dans les lieux publics.
Le souci des autres
Je
ne propose évidemment pas qu’on revienne à des cours sur les bonnes manières à
l’école, mais simplement qu’on ait le souci des autres lorsque l’on partage un
espace public et qu’on évite de penser que le chacun-pour-soi dans sa bulle est
la bonne manière d’être en public. Je pense qu’il est de la responsabilité de
tous d’adopter des comportements d’une plus grande civilité, qui pourraient
être contagieux et devenir graduellement des normes sociales favorisant une
meilleure qualité de vie. Cela ne s’oppose nullement à une utilisation efficace
des moyens de communication actuels ou en développement.
Source : Luc Vézina, Le Devoir
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